Circuit historique de Schweighouse/Moder  

Villa

Monument numéro 2

Histoire d’un lieu symbolique dans le village de Schweighouse.


Lors de la journée du territoire du 6 octobre 2019, notre Association a eu le plaisir d’exposer à la Villa la maquette représentant le moulin dit «Letschmühl», fabriquée par notre membre regretté, Monsieur Edmond LING.

Nous voulons profiter de cette occasion pour remercier ses enfants pour les documents qu’ils  ont mis à notre disposition.

Les différents documents photographiés aux Archives Départementales du Bas-Rhin à Strasbourg et aux Archives Municipales de Haguenau nous ont permis de progresser dans l’historique du moulin Letschmühl.

L’histoire de ce moulin est étroitement liée à celle du village de Schweighouse. Elle débute en 1608 quand le comte  de Linange-Vixingen fit construire le moulin.

Il apparaît d'abord dans différents documents sous le nom de  NIEDHEIMER-Mühle.

La première mention des NIEDHEIMER concerne Jean Jacques, qui obtint le diplôme de docteur en médecine à l’Université de Besançon. 

Le 1er juillet 1601, Jean  Reinhard, comte  de Hanau, lui  accorde  en  fief  le château et la maison WASENBOURG. 

En 1610, la famille NIEDHEIMER   avait des revenus constitués de rentes en argent et en nature provenant des villages de Mittelhausen,  Woerth,  Waltenheim,  Kaltenhouse,  Schirrhein,  Schirrhoffen, Ohlungen,  Betschdorf,  Surbourg, Weitbruch, Mommenheim, Achenheim….ainsi que de Schweighouse.

Le moulin était situé à l’entrée village au lieu-dit  «Faubourg», appelé «Vorstadt» par nos ancêtres.   

Le  moulin est constitué d’une tour de maçonnerie qui supporte un toit mobile, orientable à l’aide  d’une  sorte  de  gouvernail  appelé  « queue »  ou béquille. Il était de type à deux tournants, un à grains et l’autre à huile.  Il  utilisait deux forces motrices : quand les ailes ne tournaient pas au vent, le ruisseau «Mühlbächel»  venant de la «Kälbelmatt» actionnait le mécanisme ; deux petits étangs qui font partie de la propriété apportaient le complément d’eau. C'était le plus petit moulin de la commune ; il comprenait également une auberge.

Jusqu’en 1625,  il a été donné en bail à des particuliers pour 15 sacs de blé par an.  

De 1625 à 1637, c’est la commune qui le gère pour 12 sacs de blé par an.  Il est  détruit  par  un  incendie  pendant  de  la  guerre de  Trente ans et  reste en friche pendant un certain temps.

Le 30 janvier 1660, le comte de Linange, ayant besoin d’argent, vend le moulin en ruines  à un              nommé  Louis SIEFFERT pour 100 gulden. Le bois pour la reconstruction lui est gracieusement mis à           disposition et, pendant quatre ans, il sera exonéré d’impôts.  Le  comte vend ensuite tout le village aux comtes  palatins et princes de Birkenfeld, Christian II et Jean Charles.

Le 1er juin 1670, le meunier Louis SIEFFERT vend le moulin à Christian II, comte palatin.

Le 17 avril 1672, ce dernier vend le moulin et tous ses ustensiles, le jardin et les prés à Christophe AUGST, de Breslau en Silésie, pour 270 gulden. Celui-ci doit s’acquitter tout de suite de 50 gulden, puis verse 40 gulden en 1673, en 1674 et en 1675, 50 gulden en 1676, et enfin 50 gulden en 1677, la date d’échéance étant chaque année à Pâques. Il doit également fournir tous les ans, pour la Saint Martin, 5/4 de malt     moulu, prix pour l’utilisation de l’eau qui vient des étangs qui restent la propriété du comte.

N’ayant pas encore de revenu en 1672, il ne propose à Christian II que ...  4 jeunes poules pour cette année.

Le 22 septembre 1679, Christophe1 AUGST présente une requête pour une ristourne des 200 gulden qu’il doit  encore  au  comte,  parce  que  l’armée  française, stationnée à Philippsbourg et de passage à  Schweighouse, a saccagé et ruiné le moulin.

Les AUGST  gèrent  le  moulin  de  père en fils pendant des décennies, ainsi que d’autres moulins des alentours.  Ils  sont  également   des   bourgeois  importants  de  la   commune. Christophe  AUGST, seigneurial, fils de Christophe, est meunier au moulin à Obermodern.

Jean Philippe AUGST, meunier, hérite du moulin appelé alors «Letschmühl» (la signification de ce nom  nous est encore inconnue) le 10 décembre 1755 de son père Jean Frédéric, meunier seigneurial et échevin à Schweighouse. Puis Georges Frédéric AUGST, meunier, hérite du moulin ; c'est le fils de Jean Philippe et de Marie Catherine HAMM, il est marié à Marie Dorothée GIESS, fille de Jean Georges maréchal ferrant à Schweighouse et de Anne Elisabeth MULLER.  

Jean Frédéric AUGST, autre meunier, est marié à Anne Marie GRÜNNAGEL.

En 1773, Philippe AUGST devient à son tour le meunier de cette "Letschmühl". Il est sûrement le dernier AUGST à servir le moulin avant la Révolution.

A la lecture des recensements réalisés après la Révolution, nous trouvons d’autres meuniers qui se          succèdent au moulin. Nous avons ainsi relevé : Michel HOELTZEL, meunier au moulin pendant quelques décennies, qui avait comme domestiques Chrétien CONRAD, garçon meunier, et Anne Marie GOTTAR, servante  -   Dorothée PASTETENBERG de Mertzwiller, domestique.

En 1859, Jean Raymond PAGANETTO de Haguenau achète le moulin. Il détruit l’ensemble pour        construire une nouvelle maison et une scierie. En 1880, la maison d’habitation est détruite par un incendie et reconstruite en 1882.

En 1893, le domaine est la propriété de Xavier Joseph NESSEL, neveu de PAGANETTO. La propriété est à l’abandon quand Georges KNECHT en prend possession pour construire, en 1904, le bâtiment que nous appelons aujourd’hui la «Villa». Après son  décès, le domaine est mis aux enchères et c’est la Caisse     Mutuelle de la Grande Rue de Haguenau qui est acquéreur.

En 1930, la propriété est louée à la "CENPA" (CENtral PApier) pour loger les différents directeurs de    l’usine à papier.

A partir de 1940, le domaine est mis sous séquestre par les Allemands. Le directeur de l’époque est     Théodore BLAISWEILLER. En 1943, ce dernier négocie avec la Caisse Mutuelle l’acquisition du domaine pour la "Papierfabrik Schweighausen". Sans payer un sou, la "CENPA" devient propriétaire des lieux qui comprend 3,5 hectares. Les différents directeurs de l’usine habitent à la villa jusque vers 1985; le dernier a été Monsieur Jean GIRAUD.

En 1989, la commune achète le domaine ainsi que la parcelle située à gauche du chemin qui mène vers    l’usine d’incinération, ainsi que les deux étangs, l’un situé directement à côté de la Villa, et celui près de la maison de retraite.


Il reste à éclaircir  une énigme qui fait encore cogiter beaucoup de monde : comment se fait-il que la commune ait un faubourg  «Vorstadt» ?  Il faut certainement chercher la réponse dans certains écrits : le nom de VORSTADT apparaît dans la famille NIEDHEIMER, lors du mariage de Anne Catherine avec Théodore VORSTADT, le 26 janvier 1696. Lors du décès de Jean Frédéric Antoine, le dernier des NIEDHEIMER, les descendants  VORSTADT  héritent des biens des NIEDHEIMER. C'est donc ainsi qu'est apparu le nom de «Vorstadt»  qui, en allemand et en alsacien, signifie "faubourg", mais qui pourtant, dans notre commune, n'en est pas un !!


(1)  Pour l’instant nous ne savons pas si Christophe, le premier meunier du moulin dit « Letschmühl », est marié lors de sa venue à Schweighouse. Il se peut qu’il soit venu tout seul et qu’il ait épousé Marie Cléophe SCHAEFFER plus tard.

Sources : - Archives départementales du Bas-Rhin 

  - Archives municipales de Haguenau

  - Archives communales de Schweighouse