Circuit historique de Schweighouse/Moder  

Cenpa - Geisselbronn

Monument numéro 13

L'usine de CENPA (CENtrale PApier) était d'abord dédiée à des travaux de teinturerie, puis transformé en papeterie.
Cela s'est passé sur le lieu-dit "Le Geisselbronn".


Le Geisselbronn

Ce lieu-dit existe depuis l’origine du village. Lors des fouilles, des fragments de colonnes des 4 divinités ont été découverts sur le terrain. 

Un moulin est érigé sur la Zinsel, et successivement à partir du 18ième siècle une manufacture de tabac est créée, puis transformée en moulin à garance ; M. SCHOULER installe une filature de laine mais, suite à son décès survenu au Geisselbronn le 02/03/1874, l’usine est arrêtée.

En 1893, M. BARREIS y installe une machine à papier et elle devient l’ «Unterelsässiche Papierfabrik».

C’est ainsi que le Geisselbronn est devenu le site PAPETIER connu de nos jours. 

En 1910, 75 personnes y habitaient encore.

Les origines de la FABRICATION du PAPIER à Schweighouse sur Moder.

Col. privée: SEEL E.

Au premier plan la route qui vient de Haguenau, traverse le village et l’usine de pâte à papier pour rejoindre la route de Bitche à la hauteur de la maison forestière.

Installée dans l'ancienne usine à garance, l'entreprise de filage de laine, cessa à son tour ses activités, en raison des évènements de la guerre de 1870 et du décès survenu le 2 mars 1874 du propriétaire de l'établissement, Monsieur Eugène SCHOULER, âgé de 48 ans. L'usine est abandonnée et laissée vide pendant presque quinze années. Ce n'est que vers 1890 qu'un groupe de financiers allemands, qui venait de fonder l’Unterelssäsische Papierfabrik à Niederbronn, s'est intéressé au site du Geisselbronn à Schweighouse.

Les premières machines à papier. 

Après des aménagements importants ils y ont transféré une première machine à papier en 1893. On utilisait le chiffon ou la paille pour fabriquer le papier. Les anciens se souviennent de la " LUMPE KACHT"(grenier à chiffons). Les débuts de la fabrication de papier étaient modestes.

Trois autres machines à papier seront installées :

- la deuxième en 1896 

- la troisième en 1898 et

- la quatrième en 1906.

Appel à la main-d'œuvre spécialisée.

Il est important de décrire les difficultés rencontrées pour le recrutement du personnel; la main-d'œuvre existait sur place mais elle n'était pas spécialisée dans la fabrication du papier. La direction d'alors fit appel aux spécialistes dans les sites papetiers d'Allemagne et d'ailleurs. En 1910 il restait encore à l'usine 20 familles immigrantes qui assumaient les postes importants et incontournables. Pour assurer la bonne marche de l'usine il fallait sûrement mettre tout en œuvre pour la formation du personnel sédentaire qui venait à peine de sortir des métiers de filage de la laine.

Voici la liste nominative des familles immigrantes en 1910 : 

M. Robert BAREISS directeur de l'usine originaire de la Suisse

M. Guillaume STANGER sous-directeur de Stuttgart

M. Guillaume STEINMULLER chef d'entretien du Wurtemberg

M. Roudi NAGEL vendeur de Ettenheim

M. François STÖHSER vendeur de Höerden

M. Alfred EFFERT technicien de Götenberg

M. Walter SCHUSTER apprenti de Zurich - Suisse

M. Henri GRUMMEL apprenti de Jaegersburg

M. Georges LANGER comptable de Rostock

M. François DOLCIC sécheur de Zadobrova

M. Caspar PFISTER cocher de Hütten - Suisse

M. Joseph HADAMITZKI jardinier de Branitz - Silésie

M. Bernard STEINHÄUSER contremaître machine de Thalheim

M. Xavier WOLFMAYER employé de bureau de Wasseralfingen

M. Léon GRILL employé de bureau de Steiermark - Autriche

M. Frédéric HÄFLIGER chef de fabrication de Berne - originaire de la Suisse

ainsi que des familles de la région :

M. Joseph HUBER chef de fabrication de Niederhausbergen

M. Philippe MAULER conducteur de machine de Niederbronn

M. Ignace HAAG portier à l'usine d'Erstein

M. Guillaume ZINCK conducteur de machine de Schweighouse


L'ensemble de ces personnes ainsi que leurs familles habitaient à l'usine même.

Un inventaire du parc des machines de 1910 nous permet d'apprécier la taille de l'usine à cette époque. 

La Machine à Papier N° 1 construite par Bruderhaus à Reutlingen en 1905 avait une laize (= largeur de travail de la machine) de 2000 mm; elle était spécialisée pour les papiers minces de 15 à 30 grammes au m².

La machine à Papier N° 2 construite en 1900 par Bannig à Düren avait une laize de 2200 mm; elle était  spécialisée pour les papiers d'emballage de 40 à 90 grammes au m²

La Machine à Papier N° 3 construite par Banning en 1893 avait une laize 1750 mm; elle produisait tous les grammages de papier d'emballage.

La Machine à Papier N° 4 construite en 1896, dont le constructeur est inconnu, avait une laize de 2400 mm; elle était spécialisée pour le papier d'emballage de 40 à 90 grammes au m². 

La préparation de la pâte à papier se faisait dans une salle de13 piles hollandaises pour le raffinage et de 4 meuletons pour la trituration des vieux papiers.

En 1906, l'usine de pâte de papier produisait à partir du bois épicéa par le procédé au bisulfite de calcium une pâte écrue à raison de 12 tonnes/jour, soit 100 stères de bois.

Pour la transformation du papier on utilisait 2 calandres et une mouilleuse.

5 bobineuses, deux coupeuses, 3 locomobiles de 800 CV fournissaient la force motrice nécessaire pour faire tourner les machines.

Il est important de noter également que les vieux papiers subissaient un traitement préalable par une opération de blutage c'est à dire enlèvement des agrafes, épingles et autres objets pour ensuite être traité soit au meuleton à froid ou au broyeur Thiry à la vapeur. Le traitement des chiffons demandait aussi des étapes successives de traitement à savoir enlèvement des boutons, des boucles de ceinture, ensuite le trempement dans des bassins jusqu'à la putréfaction et enfin dans des cuiseurs sphériques chauffé à la vapeur.



Evolutions

Après la première guerre mondiale 1914/1918, les propriétaires allemands ont cédé l'usine à la banque STAEHLIN de Strasbourg qui détenait la majorité des actions.

En 1919 la banque accorda l'exploitation et la jouissance de l'usine à M. David WEILL, papetier de métier pour un délai de 1 an, au terme duquel M. WEILL devint acquéreur de l'établissement.

Ensuite M. WEILL s'associa avec M. WOLFF de la Compagnie Générale des papiers et conclut un contrat en vertu duquel la fabrication ainsi que la vente des produits de l'usine le sont sous le nom de Papeteries du Bas-Rhin.

En 1929 fut créée par fusion des usines de Bègles dans la Gironde ainsi que l'usine Pfindel de Schiltigheim (Alsace) la Sté CENPA (Centrale Papier) dont l'usine de Schweighouse devint la maison mère.

Pendant cette période, l'usine fut remaniée complètement. La machine N° 4 fut transformée par CORDEBART et MICHAUD, l'usine de pâte complètement rénové, de même que les bassins de récupération dits Fangstoff et trois nouvelles chaudières sont ajoutées ainsi que des piles hollandaises.

La voie de raccordement au chemin de fer d'une longueur de1700 mètres a été réalisée en 1920.


Sponsor

En 1925, les papeteries du Bas-Rhin ont patronné la Société Sportive Union de Schweighouse et une dizaine de gymnastes ont participé au concours fédéral à Lyon où ils remportèrent un 1er prix.

Les grands investissements de 1930

La machine N° 5 a été construite par Füllnerwerk pour la machine proprement dite et par Preisswerk pour le bâtiment 

Cette machine considérée comme la plus moderne d'Europe en 1930 a une laize de 2700 mm et son poids total est de 48,2 tonnes.

Le bâtiment et son château d'eau d'une surface de 2320 m² au sol, fut réalisé par la Sté Preisswerk.

Coût de la machine: 15.680.000 francs d'époque. Le bâtiment coûtât 7.000.000 francs.

En 1937, la Sté CENPA a acheté l'atelier de fabrication ainsi que les machines à fabriquer des sacs en papier de grande contenance à la Sté Natronzellstoff und Papierfabriken A.G. à Berlin sous la dénomination "NATRONAG". Cet ensemble fût alors intégré dans les ateliers dits de petit façonnage et de goudronnage.

En 1939 l'usine occupait 800 ouvriers et employés. Le montant des salaires distribués est de dix millions de francs annuels de l'époque. La consommation journalière de charbon est de 80 à 100 tonnes. La cellulose donne 14 à 16 tonnes de pâte à papier écrue par jour; 120 à 130 stères de bois écorcé sont utilisés pour cette fabrication.

A cette époque l'usine produit 55 tonnes de papier d'emballage par jour grâce aux 5 machines à papier.

Parc d'agrément

En 1930, la direction de l'usine disposant en face des bureaux d'un terrain qui servait en 1910 de potager pour le personnel d'encadrement habitant dans l'usine. La création de la Société CENPA, avec son siège à Schweighouse (1929-1930), obligeait celle-ci de soigner son image de marque. Elle fit aménager cet ancien potager en Parc d'agrément qui servait à la fois aux visiteurs et au personnel.

Une série de photos réalisées avant la 2ème guerre mondiale permet d'apprécier ce bel ensemble.

Guerre

La deuxième guerre mondiale.

Le 3 septembre 1939, la France et l'Angleterre déclarent la guerre à L'Allemagne.

Le 14 juin 1940, les Allemands sont à Paris. Le 22 juin 1940, la France signe l'armistice.

Début mai 1940, sur les ordres du préfet de Strasbourg, la direction et les cadres de l'usine doivent évacuer l'établissement et se replier vers l'intérieur. 

L'usine sera intégrée dans l'économie allemande. Le personnel restant doit travailler dorénavant sous les ordres d'un directeur allemand: Théodore Eugène BLASWEILLER, ingénieur chimiste originaire d'Eberfeld au pays de Bade. Un inventaire détaillé de l'usine est fait par Franz SCHNEEGE papiertreuhänder (curateur) le 31 décembre 1940.

L'usine, dans son état, avait une valeur estimée à 4.257.487 R.M dont 2.684.767 R.M. pour le terrain, les bâtiments et les machines.

Par les faits de guerre, il ne reste plus aucun document, ni d'avant, ni pendant l'occupation.

Nous allons à cette place relater quelques anecdotes de cette époque.

Une première anecdote

Périodiquement, les Allemands firent refondre des documents secrets ou en cours de validation. Ainsi, en1943, un wagon chargé de cartes de ravitaillement arrive à l'usine; des scellés étaient apposés sur le wagon. Des inspecteurs armés et la Gestapo assistèrent au déchargement et à la destruction des cartes. Le personnel de l'usine en poste se douta de l'importance du chargement et comprit vite qu'il s'agissait de cartes de ravitaillement et de vêtements en cours.

Les paquets de cartes furent mis dans les meuletons, mais par ruse le chargeur en poste bloqua la meule qui de ce fait fit déborder le conge et les paquets de cartes tombèrent à travers les ouvertures au sol. Les Allemands ne remarquèrent pas la manœuvre. C'est ainsi qu'une distribution de cartes se fit clandestinement dans les foyers à tel point que les instances du "Lebesmittelamt" de Haguenau se rendirent compte de l'importance des tickets sur les collecteurs des magasins. Une rafle fut faite dans les maisons et sa suite une quinzaine de personnes furent internées à Schirmeck, mais beaucoup pour une courte durée, après un constat de fait. Avant l'arrivée des cartes, les gens avaient de l'argent mais pas de tickets pour acheter. Après ils eurent des tickets, en veux-tu en voilà, mais plus d'argent à dépenser.

Une deuxième anecdote.

La direction de l'usine donna l'ordre de dégager le papier dans le magasin du stock. Ensuite arrivèrent des wagons chargés de toutes sortes de matériel, des ballots de draps teinte kaki, des chapeaux des soldats d'Italie, des mouchoirs, des lacets de chaussures, des passe-montagnes, etc…Plus de 30 wagons de matériel furent stockés dans ce local. Un peloton de soldats allemands fit la garde. Mais encore une fois, le personnel de l'usine échappa à la surveillance des soldats et s'approvisionna dans le stock, le drap kaki teinté en d'autres couleurs servirent à confectionner des pantalons, des robes etc… les mouchoirs servirent de troc avec les paysans des villages environnants contre du beurre ou des œufs ou encore des pommes de terre. Un vrai trafic fut établi que les autorités allemandes ne purent pas parer. Le nom donné à ces produits s'appelait "Badoglio", nom d'un général italien. Les chapeaux servaient aux pêcheurs à l'après-guerre.


L'effectif de l'usine, à cause de l'annexion de fait de l'Alsace et de la Lorraine le 24 juillet 1940, baissait régulièrement du fait du service militaire obligatoire et de l' "Arbeitsdienst". En conséquence la production subit le même sort. L'usine, s'équipa d'un stand de tir pour le personnel, mais il servit principalement à la Jeunesse hitlérienne dite Hitler-Jugend. Les jeunes à partir de 10 ans révolus devaient s'entraîner à ce stand de tir. A partir de 1943, les autorités allemandes firent installer 2 "blockhaus", l'un à l'entrée du hangar à vieux papier et l'autre sur le chantier à bois.

De même un "Bunker" fut construit sous la terre brûlée"Pyrite". Cet abri devait servir en cas d'attaque aérienne, ce dont l'usine n'a jamais été victime. 

Sous l'occupation allemande, l'usine à papier a créé une Ecole Papetière, une première de ce genre. C'était une Ecole Technique de formation de papetiers ainsi que de personnels des Services Entretiens et Administratifs. Les formateurs étaient M. Laurent Reinhart, Georges Mallo et Charles Hauprich.  Sous l'occupation allemande, l'usine s'appelait Papierfabrik Schweighausen A.G.

Malgré la vente du stock de papier de l'ex-Cenpa, les résultats étaient médiocres. 

En 1941 l'usine annonça un bénéfice de 43024 R.M. En 1942 une perte de 572.143 R.M. et en 1943 une perte de 16.745 R.M. 

Le 1 avril 1941, Mons BLEISWEILLER acheta la Villa Letchmuhle suivant un arrêté du 21 janvier1941 de la "Zivilverwaltung" pour un prix de 33000 R.M. Les cédants étaient Monsieur Louis Guillier fondé de pouvoir, Monsieur Flesch et Monsieur Friedmann, membres du conseil d'administration du Crédit Mutuel situé Grand-Rue à Haguenau. 

Pendant l'année 1944, l'usine régressa sensiblement par manque de matières premières et surtout par manque d'effectifs.  Le 27 novembre 1944, l'usine fut définitivement arrêtée, la bataille faisant rage autour de Schweighouse.

Le front de la Moder

Le 25 novembre 1944, les premiers obus tombent sur le village. On déplore la première victime Mlle Anne Scheuer, infirmière. En tournée au village dans la Rue de l'Ecole, entre la maison du Cercle et l'impasse de la maison Aloïse Koch, elle a été mortellement atteinte par des éclats d'obus. Ensuite les Américains prennent possession du village mais c'était de courte durée. L'opération Nordwind déclanchée par les Allemands, fait reculer l'armée Américaine sur les bords de la Moder. Les Allemands reprennent le village le 24 janvier 1945 et le front s'établit derrière la Moder. Les Américains sont établis dans le village et les Allemands dans l'usine à Papier. Cela devait durer du 26 janvier jusqu'au 15 mars. A 6 h 45, le village et l'usine sont libérés. Schweighouse est détruit à 85 %; plus de 22000 obus sont tombés sur l'usine à papier. Il ne reste que ruines et décombres à l'usine, 40000 M3 de gravats et de ferraille sont à évacuer. Une lettre du 2 juillet 1945 mentionne que 2887 mines ont été enlevées et que le territoire est entièrement déminé. Du côté de la population, on déplore, une déportée juive, 16 victimes militaires, 34 incorporés de force (disparus ou morts) et 19 victimes civiles.

Les dommages de guerre

La série de photos qui suit nous fait voir un paysage apocalyptique: un chaos de murs éventrés, les toitures percées, l'outil de travail anéanti. Pouvait-on encore avoir un espoir que cette usine allait à nouveau produire et faire vivre les habitants du village ?.

Les grèves de 1936

La France vivait depuis 1932/1933 dans une crise économique. Le chômage était partout. Les syndicats ne pouvaient plus contrôler les mouvements de grève. Les salariés de l'usine sous le contrôle de la C G T subissaient la pression du syndicat, celui-ci mit tout en œuvre pour faire la grève comme tout le monde.

Vers la fin mai 1936, les premières réunions eurent lieu dans les restaurants et c'est à partir du 9 juin 1936 que l'usine fut arrêtée pour grève totale. Les salariés occupèrent l'usine 24 h sur 24 h. Les épouses apportèrent aux grévistes en poste les repas de midi et du soir. L'après-midi, les grévistes furent convoqués en réunions sur le tas. Un orchestre composé de grévistes animait ces réunions, on dansait et on chantait la Marseillaise et surtout l'Internationale. 

La grève devait cesser après une quinzaine de jours d'occupation de l'usine.

Les résultats de cette grève furent non négligeables à savoir l'aménagement du temps de travail et les premiers congés payés de 12 jours.

L'Après-guerre

Le redémarrage des ateliers

Mai 1945: de l'usine en ruine, il ne reste plus aucune trace de document, d'état du personnel, d'archives, même plus une table ou une chaise, tout a brûlé. Monsieur Maurin directeur de l'avant guerre revient sur les lieux. Voyant la catastrophe, il suggère à la Direction Générale à Paris de ne pas laisser cette usine à l'abandon mais de la reconstruire. Après maintes tractations avec toutes les instances et l'appui des personnes influentes, la Direction Générale donne son accord pour reconstruire l'usine. C'était le ouf de soulagement des habitants de Schweighouse et des environs. L'espoir renaît, les papetiers mettent tout en œuvre. Les premières embauches sont faites. Le premier travail à faire consiste à dégager les décombres, à couvrir et à protéger les éléments de machines récupérables avec les moyens de bord. Nous devons aujourd'hui un grand merci aux pionniers de l'époque qui avaient autant de soucis dans leurs foyers, car le village était également détruit à 85 %. Sur le marché, on manquait de tout. Les instances militaires autorisent l'usine à récupérer du matériel dans les fortifications de la ligne Maginot. Le courage et la ténacité des Alsaciens permet à l'usine de produire. Du 15 au 31 décembre 1945, 148500 sacs sont fabriqués et vendus. L'usine était une vrai fourmilière, tout les corps de métiers étaient présents. Tout le monde a mis la main à la pâte. C'est ainsi que la machine à papier N° 4 a démarré en juin 1946, l'usine de pâte à papier en juin 1947 et la machine N°5 que l'on croyait la moins touchée a sorti la première feuille de papier en août 1948. La machine N° 1 a démarré en Juillet 1950, après son transfert de l'usine de Voulpaix à Schweighouse, la machine à papier N° 2 en octobre 1951.

Entre 1949 et 1952, est inauguré le bâtiment administratif, l'atelier d'entretien, la centrale électrique et à la construction d'une station de pompage (1952).

En 1954 un atelier d'enduction est construit et on installe une machine à Goudronne, deux crépeuses et une paraffineuse. En 1958, c'est le grand investissement sur la machine N° 5 pour fabriquer du papier Kraft destiné à la sacherie de Schweighouse. 

Le plein emploi

Après la reconstruction l'usine note des résultats satisfaisants. Pendant cette décennie, les Oeuvres Sociales se développent à travers le Comité d'Entreprise. Une série de photos des Fêtes de Noël, Colonies de Vacances et excursions sera présentée dans un chapitre séparé. 

En 1955, tous les dommages de guerre sont réglés, pour un coût total de 945 791 296 francs, alors que la base du calcul partait d'une valeur de l'usine de 69 979 766 francs en 1945. 

      En 1960 vient la fusion avec le groupe LA ROCHETTE. La valeur de l'usine est de 4 300 000 nouveaux francs, terrain compris.

Détail par machine à papier:

Machine I   250 000 N F

Machine II   600 000 N F

Machine IV 1 500 000 N F

Machine V 2 500 000 N F

Commence alors une longue mutation interne dans les activités de fabrications et commerciales. Après l'arrêt de l'usine à pâte en 1955. La machine N°5 fabrique du papier Impression Ecriture, la machine N° 4 du support pour l'atelier d'enduction et la machine N° 2 du papier mince. 

A cette époque l'usine occupe 97 cadres  maîtrise,  employés, et 512 salariés. 

En 1964, l'usine change de directeur et la série d'arrêts de machines continue: la machine N° 2 suivie de la machine N° 1 puis la machine à goudronne.

En 1965, la Sté Rochette Alsace cède son atelier de fabrication de sacs grande contenance à la Sté Charfa qui emploie 120 personnes. Il n'existe plus de programme réel pour les machines. De plus de 600 personnes employés en 1956 il ne reste que 275 personnes en 1974. La grande usine de l'avant et de l'après-guerre est agonisante. Un nouveau changement de directeur redonne un peu d'espoir. Peu à peu, un nouveau programme est mis en place et une nouvelle orientation trouvée pour les machines N° 4 et N° 5.

Une réorganisation du travail avec le personnel est instaurée par un système de polyvalence. Les bâtiments de l'usine sont assainis et les anciens ateliers sans affectation démolis. Un nouveau plan d'investissement est mis en place.

Les machines à papier N° 4 et 5 sont orientées, l'une vers le papier à contact alimentaire et l'autre vers le carton. 

Les investissements depuis 1975 :

Mise en route de la chaudière F W au fuel (démolition des chaudières à charbon)

Acquisition d'une nouvelle bobineuse 

Achat de 2 machines à fabriquer des mandrins

Un tapis transporteur au PULPER M 5

Nouvelle bobineuse sur la machine 4

Implantation du groupe imprimeur M 4

Implantation du groupe enduction M 4

Machine à emballage  automatique 

Mise en place d'une chaudière électrique 

Transformation de la Presse M 4

Alimentation en vapeur depuis l'usine d'incinération 

Automatisme sur la bobineuse M 5 et du poste emballage

Les investissements de 1992 à nos jours:

En 1992, mise en route de la station d'épuration.

Les investissements de 1993 à 1998 étaient faibles à part l'installation d'un surchauffeur à la chaufferie pour utiliser la vapeur de l'usine d'incinération.

Le 21 mars 1998, la société Rochette Alsace ainsi que sa filiale Sofratube fut racheté par le groupe SONOCO.

Sonoco est une société internationale d'origine américaine, leader sur marché du tube en carton. Elle possède en Europe plusieurs tuberies et par son concept d'intégration offre de nouveaux débouchés au site ainsi que d’autres perspectives notamment en matière d'investissements.

Les investissements par la Sté Sonoco sont: 

En 1998, la reconstruction de la halle du Pulper M 5 et installation d'un Pulper à cassés sur la M 5

En 1999, la reconstruction du cylindre aspirant M 4

En 2000, la reconstruction du poste sécherie M 5.

En 2001, la modification de la chaîne d'emballage des machines N° 4 et 5

En 2002, le changement de la fosse M 5 et la reconstruction de la bobineuse M 5 ainsi que le changement du système informatique.

Nous voulons à cette effet encourager dans cette voie et que la papeterie de Schweighouse puisse encore longtemps exister et être le gagne-pain pour les 120 personnes travaillant toujours sur le site.

Les dirigeants de l'usine depuis son origine de 1893 à nos jours


Mr Bareiss 1893 - 1918 Unterelsässiche Papierfabrik

Mr Weill 1918 - 1929 Papeteries du Bas-Rhin

Mr Wolf et Weill 1919 - 1929 Papeteries du Bas-Rhin

Mr Maurin 1930 - 1940 Cenpa

Mr Blasweiller 1940 - 1945 Papierfabrik Schweighausen A G

Mr Maurin 1945 - 1951 Cenpa

Mr Hannezo 1951 - 1964 Cenpa et Rochette Cenpa

Mr Girault 1964 - 1975 Rochette Cenpa

Mr Delaveau 15 mois Rochette Cenpa

Mr Laurent 1976 - 1991 Rochette Alsace

Mr Einhorn et Letoret 1991 - 1998 Rochette Alsace

Mr Jacques Muller 1998 - à nos jours Sonoco Paper France


Œuvres Sociales

Après le conflit et la reconstruction de l'usine, une vie plus sereine reprend le dessus dans l'usine. Dans le cadre des œuvres sociales, le Comité d'Entreprise organise annuellement des manifestations pour nouer un peu plus de liens humains entre les employés de l'usine. 

Le restaurant d'entreprise
Cantine

En 1948, une baraque en bois est installée sur le terrain du bâtiment des mines de Noeux et sert de cantine au personnel de l'usine. On pouvait acheter des produits alimentaires pour confectionner des casse-croûtes et des boissons. Le site de l'usine n'avait pas encore l'eau potable, l'ancienne installation étant complètement détruite. L'exploitation de la cantine est confiée au Comité d'Entreprise.

En 1955 le C.E. avait le souci de servir un repas chaud au personnel venant de l'extérieur. Ce fut la brasserie Biedermann de Pfaffenhoffen qui fournit les éléments en bois que l'on installa dans le bâtiment situé au dessus du Bunker qui lui-même servait de cave. La gestion fut confiée à la famille Wild Philippe, propriétaire du restaurant du Faubourg à Schweighouse. Suite à l'arrêt de l'usine à pâte, le bâtiment de la coupeuse à bois devint disponible. Ce bâtiment fut transformé et aménagé en restaurant d'entreprise.

En 1962, le Comité d'Etablissement prit la gérance à son compte et le personnel de l'usine , ainsi que les salariés des établissement Hannsen, furent les clients du restaurant.

Les années passent, les tickets restaurants apparaissent et l'exploitation devint plus difficile à cause de la concurrence. Le déclin s'annonce doucement mais sûrement, le nombre de repas diminue, le coût d'exploitation devint trop cher. C'est ainsi qu'il fallait arrêter l'exploitation en 1998. Malgré un essai avec un traiteur, il fallut arrêter définitivement le restaurant le 1 janvier 2002, après plus de 50 années de fonctionnement.

Caisse Complémentaire

Vers les années 1947 et 1948, les chefs d'entreprises papetières se sont rendu compte que les retraités avaient du mal à joindre les deux bouts avec la retraite versée par la Caisse Vieillesse. D'un commun accord ils décidèrent de verser une rente complémentaire à partir de 1950. Les salariés de la Cellulose de Strasbourg, de la papeterie de la Robertsau, de l'usine Cenpa de Schweighouse, les papeteries de Kaysersberg et ceux de l'usine de Turckheim furent concernés par cette décision.

Au paravant, les usines versaient en espèce une rente en fonction des années de service. Le montant de ces rentes différait selon l'entreprise. En 1951, les papetiers créèrent la première Caisse de retraite complémentaire en Alsace. Elle était  une des premières en France.

Cette caisse fut nommée I.P.S.A.L. (Institut Paritaire de Retraite pour les Salariés d'Alsace), et régie par la loi du 14 mars 1941. Elle est incluse dans les accords de la Convention Collective des papetiers d'Alsace. 

En 1969, c'est la fusion avec l'A G R R (Association Générale de Retraite par Répartition) d'Alsace-Moselle et le territoire de Belfort suivant le décret du 8 juin 1946 qui autorise les entreprises à avoir des caisses de retraites complémentaires. L' A G R R n'est pas une association régie par la loi de 1901, c'est une institution de retraite complémentaire définie par l'article L 922-1 du livre IX du code de la Sécurité Sociale. Comme l'I P S A L , l' A G R R a été créée par la profession papetière. 

En 1967, l' A G R  crée l'A V R R (Vacances et Repos des Retraités) qui possède une première maison à Barr (Bas-Rhin)

En 1977, création de la Prévoyance qui après une dizaine d'années devient autonome pour la couverture maladie 

En 1983, création de la Revue Couleurs du Temps

En 1986, S A F I R  (Sécurité Autonome Financière des Retraités  La Dépendance

En 1986, P R I M A  (Assurance Automobile - Maison)….

En 1990, P R I M A Mut. (Mutuelle de couverture des frais de santé individuelle)

En 1991, Fondation S A F I R (pour récompenser les actions exemplaires sous l'égide de la Fondation de France) participant au mieux-être des personnes âgées

En 1994, absorption de la C.P.P.O.S.S (Personnel des Organismes de la Sécurité Sociale)

Les Directeurs de la section Alsace Lorraine étaient : 

Messieurs Keller - Stourm - Trimouille - Schweitzer - Richter - Bailly et Monsieur Fleith (en fonction).

Ecole de couture

Sous l'égide de l'assistante sociale a été créée en 1951 une école de couture qui avait un écho favorable auprès des jeunes filles employées dans l'usine.

Les séries de photos démontrent que la joie et le sourire ont repris le dessus sur les peines et les larmes sans pour autant oublier les années difficiles du dernier conflit.

Ecole de papetier

Le 1 octobre 1957, dans le souci de la formation technique de la main d'œuvre à l'usine, la Direction, avec l'appui du Maire et du Sous-Préfet, a contacté les autorités académiques. Ainsi s'est trouvée et réalisée cette collaboration entre l'industrie et l'Education Nationale qui assurait aux apprentis une préparation directe aux métiers.

La section papetière constituait une création originale et unique dans le Département du Bas-Rhin pour cette branche. L'usine  assure un emploi à ses élèves, soit à l'usine de Schweighouse , soit dans une autre usine du groupe. Le métier de papetier est sanctionné du C.A.P ou P.E.P

Logements 

Première cité dite "Coteau de la Pinède"

Après les dommages de guerre les logements de l'usine étaient entièrement détruits. La Sté Cenpa crée une Société Immobilière du groupe pour l'ensemble de son personnel. Cette Société immobilière prend contact avec l'usine et la commune afin d'élaborer un programme de construction de maisons pour les salariés de l'usine. Une première réunion s'est tenue à Schweighouse le 27 juillet 1951. Le programme prévoit la construction de 15 maisons sur dommages de guerre et de dix maisons prises en charge par la Société Immobilière. Les terrains de construction sont acquis par l'usine Cenpa. Le type de logements choisi est de quatre chambres et d'une salle commune d'une surface au sol de 85 m² pour un coût total de 3 millions à ne pas dépasser. L'eau potable est fournie par la brasserie Muller qui est située à côté du lotissement, l'eau courante n'existant pas encore dans la commune. Le délai d'exécution était fixé courant de l'année 1952. La construction de ces 25 maisons était nécessaire pour loger le personnel de l'usine alors que le village était en pleine reconstruction. 

La deuxième cité nommée Maurice Franck 

En 1964, sous l'impulsion du Maire Paul Knecht, un deuxième lotissement a vu le jour avec la participation de l'usine à papier Rochette Cenpa. Une série de logements est réalisée en maisons jumelées et c'est à l'occasion de l'inauguration de la Maison Communale le 26 septembre 1965 qu'avait lieu également l'inauguration de la Cité Franck, en mémoire au Président Directeur Général de la Rochette Alsace, grand ami et bienfaiteur de la commune.


Evénements

Le 11 octobre 1958
Sous le signe du jumelage Alsace - Savoie

Les relations amicales entre le Maire Paul Knecht et Maurice Franck P D G de Rochette Cenpa ont fait naître l'idée d'un jumelage entre les deux villes qui se ressemblaient comme deux sœurs. Schweighouse comptait à l'époque 2000 habitants. Une délégation de Schweighouse a pris ce jour le train à Strasbourg à destination de Chambéry. Un comité d'accueil de La Rochette les attendait en gare de Chambéry. Le maire Antoine Rosset accueillait la délégation alsacienne pour lui faire visiter la ville de Chambéry. Le 12 octobre eut lieu le jumelage de Schweighouse - La Rochette, avec remise officielle de l'acte de jumelage, suivi des visites de l'usine de la Rochette, du Lac du Bourget et de l'abbaye de Hautecombe. Le dimanche 12 octobre 1960, ce fut au tour de Schweighouse d'inviter les représentants de la commune et une délégation de La Rochette pour concrétiser l'acte de jumelage. A cette occasion, la rue La Rochette fût inaugurée en présence de Monsieur Pierre Pflimlin, Conseiller Général de Haguenau, Député et Maire de Strasbourg, de Monsieur Kistler, Sénateur, Monsieur Maurice Franck, P.D.G. de la Société Rochette Cenpa, Monsieur Rey Maire et Conseiller Général de La Rochette. 

La municipalité de La Rochette invite à nouveau le Conseil Municipal de Schweighouse et une délégation de l'usine Rochette Cenpa à l'inauguration de la Mairie et de la Rue de Schweighouse-sur-Moder à La Rochette les 19,20 et 21 septembre 1964. 

La délégation de Schweighouse est accueillie par Monsieur le Maire Albert Rey, le Ministre Pierre Dumas, le Préfet Gilly, le Sous-Préfet Brisset. Les trois journées bien remplies ont laissé des souvenirs inoubliables à la délégation de Schweighouse.

Les 25, 26 et 27 septembre, c'est à Schweighouse d'inviter les Rochetois pour inaugurer la nouvelle Mairie ainsi que la Cité Franck.

Après que Monsieur le Sous-Préfet Lechner eut coupé le ruban traditionnel, les invités ont pris part à une cérémonie religieuse dans la salle Culturelle de la Fondation de Furst présidée par Messieurs le Curé Flicker et le Pasteur Birmelé. Ensuite, les participants ont visité les maisons de la Cité Franck. Monsieur Pierre Franck, le fils de Maurice, a dévoilé la Plaque de la Rue Cité Franck. Une fois encore, c'était une grande journée sous le signe de l'amitié liant l'Alsace et la Savoie.

Route à travers l'usine

Le complexe de l'usine a toujours été traversé par le chemin vicinal N° 85. Cette route allait vers Mertzwiller et également vers Haguenau. Elle desservait le gare et le restaurant de La Gare. Suite à de nombreux accidents graves, voir mortels, il a été décidé de contourner le site de l'usine vers le Nord Est. Ce fut chose faite en 1958 avec une entrée pour l'usine et un portillon piéton pour le personnel de l'usine devant aller à la gare. Aucune autre ouverture n'est tolérée tout au long de ce tronçon de la route. Cette réalisation serait incontournable, surtout avec le trafic de voitures de nos jours

Aménagement de la Zinsel

Les débordements de la Moder et de la Zinsel étaient devenus légendaires; depuis des décennies, on pouvait lire dans les procès-verbaux de la commune les plaintes de la population envers les propriétaires des moulins sur les deux rivières. Mais rien ne fut réglé jusqu'en 1958. Le 3 février 1958, a été créé le syndicat intercommunal de la moyenne Moder. Il a été décidé de curer et de rectifier le lit de la Moder et de la Zinsel. C'est cette dernière qui nous intéresse. L'usine était traversée par la Zinsel qui posait d'énormes problèmes de régulation et de stabilité du cours d'eau. C'est aux environs de 1860 que le propriétaire de l'usine avait fait réaliser le canal de décharge qui a permis de réguler le cours d'eau dans l'usine. Les travaux d'aménagement décidés en 1958 ont permis de réaménager entièrement le cours de la Zinsel. La Zinsel qui traversait l'usine fut supprimée, et le canal de décharge déplacé vers l'ouest dans le nouveau lit. Une station de prise d'eau fut construite sur le nouveau tracé. C'est par cet ensemble de travaux que le problème des inondations a été réglé à Schweighouse. 

Journal d'entreprise

Un premier journal édité par le groupe "Cenpa" a été diffusé dans les années 1950/51. Ce journal avait pour objectif d'informer l'ensemble du personnel du groupe de la vie dans ses établissements, des nouveautés techniques et des investissements en cours. Une grande partie du journal relatait les naissances, mariages et décès dans les familles du personnel. Le journal a paru jusqu'en 1958 après la fusion avec La Rochette. Un deuxième journal a vu le jour sous les auspices de la nouvelle Société Rochette Cenpa en 1988 sous le nom de "Différences". Ce journal informait également tout l'ensemble du personnel sur la vie du groupe, les nouvelles des usines, les évènements familiaux, sa diffusion est arrêté avec la création de Rochette Alsace. .

Nous avons le plaisir de vous montrer quelques exemplaires de ces journaux.